Dans le matin blême de Meyran, mais pas seulement

Plein de rebondissements ce WE. Pour finir par un changement de plans concernant l’hivernage de l’Iboga.

Mais par le commencement.

Une sortie en flottille avec les camarades de Jouët était prévue au départ d’Arcachon à la mi-journée. Tenté d’y participer je devais faire avec les circonstances : départ possible du Ferret pas avant midi et prévision météo entre pétole – et pétole +. Un moteur toujours pas fiable malgré l’additif en or que j’avais versé dans le réservoir (Matt Chem HB carbu 28€, ça fait sans doute quelque chose, mais pas ce dont mon vieux Yam 2T avait besoin). Bref : pétole sans moteur = horaire très incertain.

Voilà pourquoi j’avais sollicité la communauté pour m’aider à trouver un hébergement pour le bateau (une place dans un port) sud bassin pour les 2 semaines restant à courir avant mon RV de mise au sec de la fin du mois. Alors ce bon Joël, de Patxi, régatier hors pair doublé d’un généreux animateur de la flotte, m’avait trouvé une place provisoire à l’entrée du port de Meyran ouest, à côté du Sun 2000 de Jean-Louis, Mouille-Col, et du 680 de l’autre Jean-Louis. Merci Joël !

Nanti de ma feuille de route sans aucune garantie sur les durées, je me suis rendu en voiture à Meyran, d’où Jean-Louis (de Mouille-Col donc) m’a conduit à la jetée Thiers où j’ai embarqué dans la navette UBA de 11:00.

Terrain de Molky bien ratissé

Terrain de Molky bien ratissé. Rassurez-vous : rien de vivant là dessus

Une demi heure plus tard, débarquement à Bélisaire, marche jusqu’à l’Iboga, embarquement et préparation des voiles tandis que le bassin se remplit des quelques cm d’eau qui manquent. Un filet d’air NE me permet de sortir de l’escoure du phare. Dans le chenal, le courant de flux assez fort pour un coef moyen m’emporte sans que le filet d’air n’aide à traverser les corps morts. Je dois démarrer le moteur. J’obtiens les 3 minutes de fonctionnement qui me permettent de sortir des mouillages. Ensuite jusqu’à Péreire, ça va être de tous petits airs, variables en direction : un coup sud, un coup est… Là, le courant m’a emporté dans la bonne direction et un peu d’air dans les voiles a fait le reste. Instant jubilation. J’ai faim ! Alors je mange. Pain à l’huile avec super jambon de Terruel.

Rencontre du 12e type

Rencontre du 12e type

Larges bords entre les corps morts d’Arcachon, les jetées, la queue de baleine qui plonge encore à Eyrac pour quelques semaines. Là je vois les copains pas loin. Appel à la VHF 77 pour connaître le programme. On se rejoint à l’entrée du chenal de Cousse. Voilà la flotte qui remonte Mapoutchet avec le jus. On attend les derniers.

À la poursuite du 680

À la poursuite du 680

Chenal de Girouasse, en direction d’Andernos. Abattée à tribord dans le chenal du Courant. On est au portant, les Jouët ne sont pas véloces. Certains ont sorti le spi. La flotte de Jouët est accompagnée par un Ti-bac vert (un modèle original aux accents du bassin, par Bo Yachting, une collaboration des chantiers Bonnin et Bossuet) et le Skippi 750 « Quasar 4 » de Faf et Marjolaine qui tire des bords de largue. Au débouché du Courant, pointe du Bourrut, nous voilà dans le chenal du Teychan. La flotte hésite : aller jusqu’à la Sableyre ? Rentrer ?

Du Bourrut à Meyran carte de JM Bouchet extrait

Du Bourrut à Meyran carte de JM Bouchet extrait

Sur l’Iboga, c’est route au sud direction Meyran, Je vise juste la balise 5 qui marque le « passage des Gujanais » étroit estey au travers du banc du Tès, puis je remonte le Passant vers l’ouest, avant de trancher à travers la Matelle pour viser la balise K5, entrée de l’estey des Angoulins qui mène à Meyran. C’est la fin de l’étale, la renverse commence à se faire sentir. Vent arrière en ciseaux tribord amure, puis empannage : le chenal tourne 4 fois. Le vent est assez soutenu maintenant, peut être 10 nds. Après la dernière balise verte, j’affale et je ferle rapidement la GV pour rester sous génois. Je prépare les aussières. Voilà l’entrée du port. Le chenal est étroit, herbes à bâbord et à tribord. Un bateau échoué haut dans le pré salé. Je me concentre pour gérer l’erre et la trajectoire pour aller me caser au ralenti entre les poteaux de ma place. Et voilà ! Même pas touché. C’est qu’on n’est pas habitué aux manœuvres de port sur l’Iboga, à force de beacher ou de prendre des corps morts…

Iboga bien amarré à la place que m'a trouvée Joël de Patxi

Iboga bien amarré à la place que m’a trouvée Joël de Patxi

Ensuite, c’est l’expérience de l’amarrage de ton bateau avec des aussières à poste qui ne sont pas réglées pour ton bateau, normal. Réglages. Ça a l’air bon : le bateau ne peut plus reculer ni avancer, ni riper… On est bon. Repos. Enfin, presque : voilà de la visite. Un collègue jouëtiste qui vient pour la soirée à la cabane. Et Jean-Louis, celui du matin, qui vient voir si tout va bien (son Sun 2000 est à 2 places de l’Iboga). Puis Fabrice, qui vient de caréner son nouveau Jouët sur le parc du chantier Debord au fond du port (tiens tiens, il prend aussi des bateaux en gardiennage Debord ?)…

Alors c’est le moment de rejoindre les jouëtistes à la cabane du port du Canal, plus loin juste après Larros et avant la Barbotière. Apéro, conversations animées, échanges de trucs et astuces, grillades, allocution du Président, libations… la soirée passe vite.

Retour au bateau pour la nuit (je zappe ici l’épisode où je ne trouve pas la clé de la maison de Manue et Roland alors je retourne dormir au bateau). Apparemment tout va bien. Laissé à la PM, le bateau est maintenant posé sur la vase. Je descends à l’échelle. Installation. Sommeil. Il est minuit.

Quelques instants plus tard, un bruit suspect répétitif finit par me tirer du sac. Il fait nuit : bientôt 7h du matin. Je sors sur le pont humide. Il fait froid aussi. Peut être 7°. Là, c’est un peu la cata.

Iboga en sale posture, mais le pire est passé je crois

Iboga en sale posture, mais le pire est passé je crois

Le bateau appuie sur le poteau tribord qui est salement couché. C’est le poteau sur lequel est prise la garde qui doit empêcher le bateau de porter sur le quai à l’avant. Résultat : la ferrure d’étrave est accrochée, suspendue, à un barreau de l’échelle. Tandis que l’arrière du bateau est en train de descendre avec le niveau de l’eau. Il reste plus de 2h à descendre. Je vérifie les amarres : heureusement aucune n’est tendue à bloc. Le gros souci c’est comment je vais décrocher l’étrave vite avant que le bateau descende encore ? Alors je tente divers trucs, en caleçon et t-shirt (chaussé quand même) dans la nuit, en évitant de glisser sur les pontons vermoulus : une longue drisse pour redresser le bateau dans l’axe. Soulever l’étrave (tiens, fume : rien ne bouge). Faire rouler le bateau tant qu’il flotte. Rien. Faire levier avec ma grande perche. Cassée. Résultat : nul. Je suis réduit à attendre que la marée finisse de descendre et voir ce qu’il va se passer : si l’angle devient trop fort, possible que l’étrave glisse ? Mais quels dégâts ? Je ne suis pas très happy là. Maintenant, l’adrénaline est passée et je commence à avoir sacrément froid. Le jour s’est levé. Je me réfugie dans la voiture. Il fait de plus en plus froid. Apparemment l’arrière du bateau ne va plus descendre et l’étrave et / ou l’anneau de remorquage est toujours accrochée. Stand by, donc. Je laisse le bateau en plan et pars chez Manue (je trouve la clé !) me réchauffer. J’y passe la matinée.

Je retrouve le bateau vers 15:30. Il flotte, décroché de l’échelle ; le poteau défaillant est couché maintenant, retenu au bateau par les aussières. Bon, apparemment il n’y a pas de dégâts à l’étrave. Je ferai un bilan de solidité quand le bateau sera à sec.

Maintenant, j’ai le choix : soit j’installe le bateau à une autre place (il n’en manque pas en cette arrière-saison) pour comme convenu attendre la sortie d’eau du 30 octobre, soit autre chose.

C’est cette dernière qui l’emporte.

Je suis passé au chantier Debord. J’y rencontre Grégory. On se connait un peu. Grégory avait organisé il y a 10 ans les puces nautiques de la Hume, avec une conférence de son ami Corentin de Chatelperron. C’est là que j’avais fait la connaissance de Corentin, juste revenu du Bengale avec un bateau expérimental en fibre de jute. La chronique de ce RV humide à la Hume et retour ventilé ; le billet sur l’initiative de Corentin 8000 miles sur un bateau en fibre de… jute ! Ensuite, j’avais eu la chance de pouvoir programmer Corentin à TEDxBordeaux en décembre 2012. Il avait fait un tabac depuis la scène du TNBA, regardez vous même son talk de 12mn 📺 « Jute do it! » Alors avec Grégory, on échange un peu sur Corentin, comment ils se sont connus et son actualité (il passe sur Arte la semaine prochaine dans le documentaire 4 mois sur ma biosphère, une plate-forme flottante en totale autonomie, en 2018. Il y a un livre de ça aussi. Bref, on est admiratif de notre ami aventurier et de son impact avec le Low tech Lab qu’il a initié.
Mais mon point là maintenant c’est l’hivernage de l’Iboga.
Sur un coup de tête (et après avoir vérifié que ça ne serait pas trop plus cher) je décide de le confier au chantier.

Retour à l’appontement défaillant. Je remets les aussières comme je les avais trouvées ferlées serrées autour des poteaux, enfin… les deux poteaux qui restent. Je dois maintenant aller au moteur (contre vent) jusqu’au fond du port. Or, le moteur… vous vous souvenez ? Manou mon équipière va m’aider à aligner le bateau avec le chenal. Je lance le moteur. Pousse les gaz pour aller le plus loin possible avant de caler. Cale. Utilise l’erre pour me mettre à couple d’un chaland. Relance. Comme ça 2 fois. Une dernière pour faire le tour de ce petit chalutier ancien qui occupe la moitié de la largeur du port et j’ai assez d’erre pour venir m’installer doucement à couple de cette jolie pinasse devant le chantier.

Iboga à couple devant le chantier Debord - fin de l'épisode, fin de la saison

Iboga à couple devant le chantier Debord – fin de l’épisode, fin de la saison

Le bateau sera calé sur le parc demain lundi.
Une bonne chose de faite.
La suite appartiendra à la phase « hivernage et carénage sont les deux mamelles de l’Iboga hors saison ».

L’album photo du WE