Noche Tchanquées

Ce samedi 5 octobre 2019, il ne fait pas chaud. Je préfère l’annexe pour me rendre au bateau. C’est un petit coëf et la marée baisse doucement depuis bientôt 3h. Quelques indices me rappellent que ce n’est pas moi qui ai laissé le bateau après sa dernière marée… Ah ! Oui, ce sont Pascal et Mylène, qui ont passé 2 jours à l’île la semaine précédente. Je reconnais bien le style de Pascal dans le soin apporté aux amarrages ;) Mais on ne peut pas trainer ici, la mer baisse. D’un coup de moteur je pousse le bateau vers le chenal, croche une bouée le temps de gréer l’Iboga et ranger mes bonnes victuailles dans la cambuse. Ensuite, décider. On va où ? Arguin avec le courant ? Le bassin à contre courant ? Arcachon ? Claouey ?

Consulter les photos de cette marée
Consulter les photos de cette marée

Il est 14:00. Déjà je traverse le chenal. Ça tire vers le sud. Le Moulleau. Allez, je remonte même si le vent est pile dans la route, et relativement faible. Un bord jusqu’aux bancs, 2e bord. Ça remonte, on continue. Les Arbousiers, OK. Puis Péreire, mais le vent faiblit. Je n’étale plus le jus. À l’ancre, génois sur le pont. Sieste-lecture. Avec ce ciel chargé, il ne fait pas chaud. Je me suis habillé…

Définition de "Embouquer" dans le Littré
Définition de « Embouquer » dans le Littré (clic pour l’original)

Voilà la renverse, il doit être 17:30, avec un peu de vent toujours nord-nord-ouest. De quoi rejoindre doucement l’estey d’Afrique bâbord amure, puis embouquer Pelourdey au portant. Très peu d’eau, je finis par passer le seuil avec dérive haute et safran flottant.
Voilà le mouillage confidentiel des cabanes tchanquées. Il y a 1 pinasse de fêtards à l’apéro, 1 vilain petit pêche-promenade blanc avec une personne qui rêvait de venir depuis 20 ans (si j’ai bien compris ses exclamations) et tenait à immortaliser ça avec des selfies, et une plate de chasseurs, à l’ancre. Je mouille l’ancre face aux cabanes, à échouer. 3 heures de montant : je veille à être bon demain matin malgré la forte chute du coefficient de marée.
La soirée est sonorisée par une meute de bernaches, au nord, qui couvre les appels des col-verts de l’île. Le ciel se dégage, offrant un coucher de soleil somptueux, puis une nuit claire. Dans la cabine, mon dîner réchauffe sur le gaz et mon rhum combat la baisse de température.
Nuit. Calme.
Avec le jour arrive un vent 12 nœuds avec rafales 20 nœuds et 30° d’angle. Thé et tartines de miel. Le ciel est bien bouché et les grains menacent. Les pêcheurs ont quitté la tonne et retournent sur le continent. Je grée le foc n°1 et la GV à 1 ris. Paré pour me faire secouer.
Sortir de l’estey de Gahignon vent arrière, puis remonter Mapoutchet au portant, ça fuse ! Ensuite le chenal de l’île, face au vent et au courant va demander pas mal de virements de bord. Je finis mon dernier bâbord dans les mouillages de la Pointe aux chevaux. Je décide de rentrer au Ferret. Ça reste du près tribord amure, puis bon plein. Un peu après la Vigne, j’aperçois sur la gauche un objet flottant orange. La curiosité (et le doute : n’est-ce pas un bateau retourné ? Besoin d’assistance ?) me déroute. Approche : il y a des têtes qui montent et descendent avec les vagues : ça doit être des nageurs qui traînent un engin de sécurité ? Approche plus et fais le rapport avec la barge-drague mouillée au Bancot… que je suis… mon truc orange c’est le tuyau de la drague, et les « têtes » ce sont des bouées de signalisation ! Bon, maintenant je sais. Je reprends la route vers Bélisaire. Dans le chenal, des voiles. Il doit y avoir une régate du CVA. Le vent est de plus en plus mou, avec toujours les longues rafales. Je ne touche pas aux voiles. Passé Bélisaire, je pique au dessus des parcs à huître pour entrer dans l’escoure de la plage du centre : ça sera plus facile d’accéder à la plage plutôt que de tirer des bords face au vent.
Voilà le corps mort. C’est la pleine mer et l’heure de manger. Ça tombe bien je n’ai rien de mieux à faire que la cuisine :) L’après-midi dans le cockpit avec encore mon livre. Rien de tel pour un dimanche d’octobre !